Salut à tou·te·s,
Bienvenue dans Muzeodrome, l’infolettre inspirante qui vous plonge dans la créativité des musées et des espaces d’expositions.
Voici plusieurs choses qui valent la peine d'être partagées avec vous cette semaine :
👀 Illustration : Ada Hop (d’après une photo publiée par l’ACMI).
1) Collecter 🎣🖼️
Dans Muzeodrome #4 (novembre 2019), j’avais évoqué la réouverture prochaine de l'ACMI (Australian Centre for the Moving Image) à Melbourne (Australie). Après 18 mois de fermeture, le musée totalement repensé a rouvert ses portes le 11 février 2021 avec un dispositif inédit : la “Lens” (l’objectif).
“Explorez, collectionnez, découvrez
La “Lens” est un dispositif gratuit à emporter chez soi qui vous permet de collectionner les œuvres d'art et les objets que vous découvrez dans notre nouvelle exposition centrale, The Story of the Moving Image. Ce que vous collectionnez sera conservé dans une collection en ligne. Vous pourrez vous plonger dans les histoires et les idées qui se cachent derrière vos parties préférées du musée et découvrir de nouveaux films, émissions de télévision, jeux vidéo et œuvres d'art à regarder, à jouer et à expérimenter.”
La “Lens” est un disque en carton contenant une étiquette NFC. Ce disque permet, au travers de points de contact, d’activer des expériences numériques et de collecter des liens vers des contenus attachés aux objets présentés dans les salles d’exposition (voir cette petite vidéo). Après la visite, un code inscrit sur le disque donne accès à ces liens depuis un ordinateur, une tablette ou un smartphone (en liant une visite à un e-mail).
Le parcours actuel de l’ACMI propose 200 points de contact. Le musée précise qu’“il n'y a pas de prix pour les avoir tous collectés”. Il indique aussi pourquoi il a choisi ce dispositif plutôt qu’une application pour smartphone :
La “Lens” ne fait qu'une seule chose. Elle n'émet pas de bip ni de notifications inutiles. Gardez votre smartphone pour prendre des photos et des vidéos avec vos amis pendant votre séjour chez nous, laissez-nous prendre des notes pour vous.
Des recherches ont montré que le fait d'engager plus de vos sens pendant une visite de musée vous aide à mieux vous en souvenir. Nous pensons que la “Lens” contribue à vous aider à vous souvenir de votre séjour chez nous plus efficacement qu'une application.
La “Lens” ne tombe jamais en panne de batterie et ne se déconnecte jamais de notre réseau wifi. Elle ne divulgue pas non plus vos informations à d'autres entreprises.”
L’approche de la “Lens” est vraiment intéressante par ses choix affirmés et sa volonté de déplacer une partie de l’accès aux contenus numériques dans la phase post-visite. Objectifs de ces choix : amplifier l’expérience in situ et fidéliser les publics du musée après la visite.
Note 1 : Une des expériences activables avec la “Lens” est la création d’une petite vidéo artistique au travers d’une captation. “Entrez dans la cabine. Exprimez vous devant la caméra qui capturera votre image pour créer un folioscope (flip book). Vous pourrez ensuite acheter ce folioscope personnalisé dans la boutique de l'ACMI en présentant votre “Lens” au comptoir”.
Note 2 : La même “Lens“ peut être utilisée pour plusieurs visites. Une fois l’étiquette NFC retirée, son disque en carton est entièrement recyclable (les encres d’impressions utilisées sur celui-ci sont d'origine végétale). La “Lens” est aussi un souvenir du musée.
2) Collecter encore 🎣🖼️🖼️
Du 11 février au 25 mars 2011, soit en six semaines, les visiteurs et visiteuses de l’ACMI (voir notule 1), ont collecté ponctuellement environ un demi-million d’”éléments” avec le dispositif inédit de visite qu’est la “Lens”. C’est ce que Seb(astian) Chan (CXO / Chief Experience Officer du musée depuis septembre 2015) indique dans une publication de l’ACMI LABS, le blog consacré aux expérimentations en matière de médias, de technologies et d'expériences utilisateur du musée.
“Nous savions que les gens aiment collectionner des objets. Et nous savions aussi qu'en tant que musée de la culture de l'écran - une culture qui est tout autour de nous et qui façonne notre politique, notre discours culturel, notre société, encore plus après une année de COVID-19 - il était vital de relier le temps et l'intérêt que les personnes passent au sein de l'ACMI pour affecter leurs choix d'écran après leur départ. Mais nous ne nous attendions pas à cette vélocité d'utilisation.”
Plusieurs points de cette première analyse sont à retenir :
La simplification des choix à effectué par les visiteurs et visiteuses augmente “l'engagement envers des objets et des expériences spécifiques”.
Les visiteurs et visiteuses se sont vraiment pris au jeu. Chacun·e collecte en moyenne 18 éléments.
Il existe une corrélation entre “les objets les plus instagrammés et les objets les plus collectionnés” avec la “Lens”.
La collecte par les visiteurs et visiteuses s’effectue pendant tout le parcours de visite, “même dans les coins les plus cachés”
Mais seulement 1 sur 5 visiteurs/visiteuses se connectent après la visite. En ligne, ceux-ci et celles-ci regardent peu d’objets par session (uniquement deux ou trois). Seb Chan explique ce phénomène par “la paralysie du choix à laquelle sont confrontés les internautes lorsqu'ils voient défiler une liste d'environ 18 articles qui se disputent l'attention de leur navigateur”.
Dans son article Seb Chan indique aussi que les équipes du musée sont bien conscientes que les données produites par les “Lens” “pourraient être utilisées pour instrumentaliser davantage le musée et son contenu”. Il précise par ailleurs que les contenus liés au dispositif ne sont pas exclusif - la “Lens” n’étant qu’un objet utilitaire qui permet hors du musée de filtrer les contenus web disponibles en fonction de la collecte effectuée lors de la visite.
Les tous premiers concepts et prototypes de la “Lens” ont été développés par l’ACMI dés 2015. Il reste encore beaucoup de questions sur ce dispositif et l’utilisation des données générées par celui-ci. Les équipes du musée travaillent avec d’autres professionnels sur les évolutions du dispositif et la compréhension des usages associés à celui.
Une des questions que se pose l’ACMI par rapport à son dispositif est de savoir comment les différentes expériences post-visites en ligne peuvent affecter le comportement des visiteurs. La post-visite est un champ encore peu exploré par les musées. C’est un domaine que j’étudie depuis plusieurs années. De nombreuses actions sont possibles pour maintenir le lien avec les publics et celles-ci peuvent se réaliser avec des moyens bien plus faibles que ceux déployés par l’ACMI.
Note : Seb Chan était jusqu’en août 2015, le Director of Digital & Emerging Media du Cooper Hewitt (Smithsonian Design Museum, New York, USA). Pour ce musée, il avait travaillé à la mise en place du “Pen” (crayon) - dispositif qui permet aussi la collecte d’information pendant la visite pour une exploration post-visite.
3) Radio Joconde 📻🖼
Cette semaine, j’ai été contacté par Noémie, une lectrice de Muzeodrome, qui m’a raconté une chose peu ordinaire qui s'est déroulée suite à la diffusion de la dernière lettre d'informations de Joconde (Service des musées de France).
Noémie, que s'est-il passé ?
Jeudi 25 mars en fin de matinée, un mail a été envoyé à la liste de diffusion de Joconde info présentant le dernier numéro. Quelqu’une a répondu à l’expéditeur, ignorant qu’elle écrivait à plus de 2000 personnes. S’en est suivi toute la journée une chaîne de réponses, d’abord pour signaler l’erreur ou demandant à se désabonner et puis l’échange collectif est devenu le prétexte à prendre des nouvelles, se saluer de toute la France et d’Outre-mer...
Vous auriez quelques exemples précis de réactions ?
Un envoi de dessin, une citation, des messages de soutien, des saluts à des vieilles connaissances, du comique involontaire avec des personnes ignorant que leur mail était lu de tou·te·s « coucou XX comment vas-tu ? Félicitation pour ton nouveau poste ». Un autre qui envoyait régulièrement le même mail exaspéré en majuscules « Vous n’avez rien de mieux à faire ? ». Un appel à créer un groupe Whatsapp pour communiquer sans saturer les messageries.
Et vous, qu'en avez-vous pensé ? La mise en place d'un outil spécifique pour effectuer ce type d'échange entre les musées serait peut-être une bonne idée ?
Comme d’autres, j’ai trouvé le feuilleton génial, j’ai aimé qu’un envoi plutôt sérieux et officiel « dérape » et permette de la rencontre humaine. Le contexte actuel évidemment joue beaucoup, on sent que tout le monde a besoin d’échanger, de se retrouver. Je ne sais pas si un groupe marcherait dans la durée, à une telle échelle, mais quelque chose a émergé.
Une autre lettre d'informations à recommander aux lectrices et lecteurs de Muzeodrome ?
Pas vraiment une lettre mais le magazine « L’art de muser » http://www.formation-exposition-musee.fr/l-art-de-muser du master expographie-muséographie de l’Université d’Artois.
Note : le titre de cette notule m’a été envoyé par Noémie qui travaille dans le milieu muséal.
4) + de 2000 🎉🎉
En lançant l’infolettre hebdomadaire Muzeodrome en août 2019, j’étais parti pour expérimenter ce format. J’ai toutefois attendu quelques mois pour publier son premier numéro en novembre 2019. Mon objectif était de parler de l’actualité créative des musées d’une façon singulière, à la fois professionnelle et personnelle. Je ne savais pas à ce moment là si l’expérience allait durer 6 numéros ou plus.
Grâce à votre fidélité et vos soutiens, j’ai continué de publier l’infolettre presque chaque semaine. Et, vous êtes maintenant plus de 2·000 abonné·e·s à Muzeodrome.
Merci pour vos très nombreux messages enthousiastes et vos recommandations…
Quelques chiffres :
70 : nombre d’éditions envoyées (avec celle-ci).
+275 : nombre de notules publiées depuis Muzeodrome #1.
2450 : moyenne du nombre de vues des derniers numéros.
43% : taux d’ouverture des infolettres (près d'une personne sur deux)
0,2% : taux de désabonnement.
5 à 25 : nombre de messages bienveillants reçus après chaque envoi.
5h à 25h : temps nécessaire pour la fabrication d’un numéro de Muzeodrome (recherches, sélections des sources, écriture, intégration). Temps auquel il faut ajouter celui passé par Ada Hop pour réaliser son illustration.
Continuons d’explorer ensemble la créativité des musées et des espaces d’expositions… Continuons d’explorer ensemble les #autresnumériques…
Note : pour présenter ce petit bilan de Muzeodrome, je me suis inspiré de celui proposé par Bulletin dans son numéro 33 ;-) #TeamInfolettre
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A tout soudain,
Omer Pesquer { https://omer.mobi/ }
Ps : Merci à @dr_kouk pour sa relecture de ce numéro et des précédents.