Salut à tou·te·s,
Bienvenue dans Muzeodrome, l’infolettre inspirante qui vous plonge dans la créativité des musées et des espaces d’expositions.
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En ces temps [toujours] étranges et incertains, voici cinq choses qui valent la peine d'être partagées avec vous cette semaine :
1) Ouverts et sécurisés 👐😷
Le 12 mai 2020, NEMO (Network of European Museum Organisations) publiait un rapport d'une vingtaine de pages consacré à l'impact du COVID-19 sur les musées en Europe (après une enquête auprès de ses membres). Depuis de plus en plus de musées ont rouvert leurs portes avec des conditions sanitaires strictes : masques et lavage des mains au gel hydroalcoolique obligatoires. NEMO collecte en ce moment toutes les images d'affiches ou de panneaux précisant ces consignes de sécurité (comme l'indique sa secrétaire générale Julia Pagel). On espère qu'une exposition en ligne de toutes ces images sera bientôt proposée...
2) Être visiblE 🖼️👩
La visibilité des œuvres d'artistes femmes exposées dans les musées est le sujet du compte twitter @Accrochee_s. J'ai voulu en savoir plus...
@Accrochee_s, qui êtes vous et que faites vous ?
Nous sommes Zoé Marty (élève conservatrice du p·m·atrimoine) qui a conçu le compte et Eva Belgherbi, (doctorante en histoire de l’art) qui a permis sa diffusion. La question du genre nourrit nos recherches en histoire de l’art (à lire ici et là). À force de photographier toutes les œuvres d’artistes femmes qu’on voyait, on a voulu mettre en commun ces images. Le mode d’emploi est simple, chacun·e peut participer en utilisant le #accrochées. Le nom du compte – @Accrochee_s – joue sur l’idée d’accrochage mais suggère également une forme d’optimisme, « on s’accroche », on veut valoriser l’existant tout en espérant pouvoir faire plus, à notre échelle.
On questionne de plus en plus les musées sur la présence des œuvres d'artistes femmes exposées in situ, mais on le fait moins pour leurs publications en ligne. Qu'en est-il ?
En ligne, les musées mettent rarement en valeur la présence des artistes femmes de leurs collections. Évidemment, il y a toujours des exceptions comme ici, ou là, mais dans l’ensemble on constate une correspondance entre la rareté des femmes artistes visibles dans les collections et leurs utilisations dans les stratégies de communication. Certains tweets sont caractéristiques de ces phénomènes, c’est le cas ici, où une œuvre réalisée par un homme est utilisée pour parler d’une artiste. Il faudrait réinvestir la manière de communiquer sur ces sujets, pourquoi pas à travers une charte, un guide de bonnes pratiques. Depuis notre arrivée (en mars) on remarque que les comptes institutionnels relaient assez peu nos posts, à l’exception de certains comme @MuseeAugustins, @lesabattoirs ou @mbabx qui retweetent ou likent leurs mentions. Ces contributions de visiteu·r·se·s sont pourtant riches et pourraient participer à la valorisation des collections, dépassant le simple prétexte d’un 8 mars ou d’une MuseumWeek.
3) Complètement TikTok ? 🎞️🤪
Lancée en septembre 2016 par la société chinoise ByteDance, l'application de micro-vidéos TikTok est un succès fulgurant. Ce succès s'appuie en occident à l'origine sur celui d'une autre application Musical.ly et sur les pratiques sociales des (pré-)adoslescent-e-s autour de la reproduction de chorégraphies (c'est d'ailleurs cette dimension qui est le plus souvent montrée dans les médias généralistes). Les contenus diffusés dans l'application sont devenus au fil du temps beaucoup plus hétérogènes et complexes. L'âge et le type de personnes qui y publient sont maintenant aussi beaucoup plus variés :
"L'équipe marketing du Carnegie Museum of Natural History a lancé son compte TikTok le 6 janvier 2020 avec une blague du conservateur des mollusques Tim Pearce, sur les escargots ; celui-ci est rapidement devenu une icône de TikTok (une “shell-ebrity” comme l'indique Pearce)". @carnegiemnh
Fort de sa réussite, le Carnegie Museum of Natural History (Pittsburgh, USA) vient d'ailleurs de passer un partenariat avec TikTok pour créer des vidéos éducatives. La plateforme semble particulièrement s'intéresser aux musées. Elle met en avant depuis le confinement dans son onglet "découvrir" le hashtag #museedepuislamaison (#museumfromhome) et elle propose en ce moment des lives depuis de "grands musées européens". Musées qui ont tous ouverts un compte certifié par la plateforme : @le_grand_palais (Paris) - @rijksmuseum (Ansterdam) - @uffizigalleries (Gallerie des Offices, Florence ) - @museodelprado (Madrid) - @mfnberlin (Museum für Naturkunde, Berlin) ...
Par ailleurs, plusieurs études indiquent que l'engagement social dans TikTok serait actuellement bien plus important que dans les autres plateformes sociales devenues matures. L’expert du marketing en ligne Gary Vaynerchuk indique même que TikTok pourrait devenir une des sources principales des codes des futurs consommateurs adultes.
Pour ne pas rater la vague, il serait donc temps pour tous les musées de rejoindre TikTok. Pas si vite, lisez tout d'abord la notule suivante...
4) Pas vraiment TikTok ! 🎞️😬
De nombreuses controverses et dérives ont accompagné le développement de TikTok. Même si la société ByteDance rend progressivement son application plus sure et conforme aux différentes législations des pays, les traitements informatisés des données collectées posent beaucoup de questions. L'appétit commercial de ByteDance est gargantuesque et il ne peut être rassasié qu'en captant le maximum de données et toute l'attention de ses utilisateurs/trices.
“Si vous dîtes : "non je vais regarder 2 ou 3 TikToks, comme ça". Pas du tout, pas du tout ! Vous allez sur TikTok et vous aller ressortir de l'application 3 heures plus tard. C'est un trou noir ce truc, vous rentrez dedans et vous ne ressortez jamais...” Jessymitation - youtubeur et tiktokeur
Les choix dans l'univers numérique ne sont pas neutres. Choisir de rejoindre Tik Tok valide les modèles de la plateforme basés sur l'économie de l'attention et le capitalisme de surveillance. Pour ma part, même si je reste très attentif aux nouvelles formes de contenus produites par les utilisateurs/trices de TikTok, je préfère explorer d'autres chemins (comme je l'indique dans ma “bio Twitter”).
5) 43 200 minutes 🕰️⏱️
Je me souviens que dans les années 70/80/90, le mois était un jalon de référence pour les productions médiatiques. Est-ce toujours le cas dans le monde actuel irrigué par les flux numériques ?
C’est la question que je me suis posée en découvrant le nouveau podcast du Centre Pompidou : “Le Mensuel”. Publié le 27 mai 2020 et présenté par Mathilde Serrell*, le premier numéro de ce podcast est intitulé “le Musée confiné”. Malgré ses qualités formelles, celui-ci donne une impression de décalage (de décrochage) par rapport à l’actualité, alors que la réouverture du centre est annoncée pour 1er juillet (le 26 juin pour ses abonné·e·s). On verra dans les prochains mois, si ce podcast trouve ses marques par rapport aux temps de l'institution et du monde qui l'entoure.
Note 1 : Un mois de 30 jours est constitué de 43 200 minutes (ou 2 592 000 secondes), d’où le singulier titre de cette notule.
*Note 2 : Mathilde Serrell anime la rubrique “La Théorie” sur France culture.
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Omer Pesquer { https://omer.mobi/ }
Ps : Un grand merci renouvelé à Michel Kouklia pour sa relecture et ses propositions.