Salut à tou·te·s,
Bienvenue dans Muzeodrome, l’infolettre inspirante qui vous plonge dans la créativité des musées et des espaces d’expositions.
En ces temps étranges et incertains, voici cinq choses qui valent la peine d'être partagées avec vous cette semaine :
1) Quelque part en France 🏚️📷
“De vague à l'âme en terrain vague / Tu divagues” Luna Parker, Tes états d'âme Eric
Né à Paris en 1959, Eric Tabuchi a eu une première vie dans la scène musicale française. C'était lui le Eric de "Tes états d'âme Eric" (1986), fameux hit du groupe Luna Parker dont il était l'auteur/compositeur. Depuis, Eric Tabuchi est photographe au sens large. Au milieu des années 2010, il collecte dans Internet des centaines de photos d'architectures qu'il classe suivant des critères simples de géométrie ou d'états - un remarquable travail qui se sédimentera dans un grand livre d'images : l'Atlas of Forms. Début 2017, Eric Tabuchi se lance dans un gigantesque projet qui prendra pour nom "Atlas des Régions Naturelles" (ARN). Avec la plasticienne Nelly Monnier, il & elle sillonnent ensemble les territoires français de petite taille pour documenter les nuances de leurs architectures vernaculaires. Une exploration sur le temps long qui prendra au moins 6 ans, peut-être 8, voir plus.
“L’Atlas des Régions Naturelles se donne pour objet de documenter le territoire français au travers des 500 régions naturelles qui le composent. Chaque région étant décrite au moyen de 50 photographies, l’archive achevée comportera 25 000 images classées par entrées, géographiques et/ou typologiques.” (Source CNAP, 2018)
A mi-parcours du projet, le 5 novembre 2020, les deux artistes ont mis en ligne l’attendu site de l'ARN, une grosse base de documentaire contenant déjà “plus de 12000 photographies prises depuis 2017”. De fabuleuses découvertes vous y attendent par-delà le bien, le mal et la France moche.
“La vraie vocation de l'Atlas, c’est de parler de ce qu'est la représentation du territoire — perçue comme étant positive ou négative — dans une volonté d’équité de traitement iconographique du bâti comme du territoire, sans hiérarchie de valeur, ni hiérarchie établie par le fait que des endroits sont plus visités que d’autres.”
Éric Tabuchi interviewé par Antoine Séguin pour la revue Exercice
Note : une exposition de photos de l’ARN était prévue au CCC OD - Centre de Création contemporaine Olivier Debré - à Tours du 6 novembre 2020 au 21 mars 2021. L’ouverture de celle-ci a été reportée.
/via Bulletin, François Bon TV, Le Poignard Subtil et plein d’autres sources…
2) Face au mur 🧱🖼️
A Rennes, le mardi 15 décembre 2020 devait s'ouvrir l'exposition “Face au mur - Le graphisme engagé de 1970 à 1990” au musée de Bretagne. Suite au prolongement en France de la fermeture des musées due à la crise sanitaire, l'ouverture de l’exposition vient d'être reportée au 8 janvier 2021. En attendant la possibilité d'accueillir à nouveau des visiteurs/teuses, le musée a mis en ligne un ensemble de pages consacrées à l'exposition, pages agrémentées d'entretiens sonores et vidéos.
Une figure importante de l'exposition est l'affichiste breton de renommée internationale Alain Le Quernec. Né en 1944, celui-ci imprime sa première affiche en 1962. Quelques années plus tard, en 1971, il se rend en voiture à l'académie des beaux-arts de Varsovie (Pologne) pour suivre pendant une année les enseignements du peintre et affichiste Henryk Tomaszewski. Un séjour qui a bouleversé à jamais son travail. “À son retour en 1972, il s’installe en Bretagne. Il travaille alors pour des partis politiques, des associations ou des institutions culturelles”.
Je vous propose en 12 minutes une visite express de l'exposition en ligne "Face au mur" autour du travail percutant d'Alain Le Quernec :
Dans "Parcours d'affichiste", l'artiste nous parle des affiches polonaises des années 60 ainsi que des cours d'Henryk Tomaszewski.
Dans "Paroles de commanditaires", “quatre personnalités politiques et associatives bretonnes reviennent sur les images marquantes de leur collaboration avec l'affichiste”. Ces personnalités parlent entre autres de deux de ses affiches politiques marquantes de 1981 : 1) "Décidons chez nous" pour le PSU avec Bécassine et son point levé. 2) "7 ans de malheurs ça suffit", affiche contre la réélection de Valéry Giscard d'Estaing.
3) Résistance Poétique ? 📜🎤
Connaissez-vous les "POCHES DE RÉSISTANCE POÉTIQUE" ? Non ? Lancées lors du premier confinement, ces "POCHES" sont conçues par Pauline Picot et Fany Buy. Pauline Picot est doctorante, performeuse et autrice. Son écriture déploie une “partition vocale lyrique et brute à travers laquelle elle interroge sa porosité au monde”. Accompagnée de comédien·ne·s, de musicien·ne·s et de photographes, elle crée des mises en voix de ses textes ou des commandes originales pour le plateau ou la création vidéo. Pauline achève actuellement une thèse de théâtre à l’Université Lumière Lyon 2, dans laquelle elle interroge l’imaginaire du fluide (magnétisme, électricité, spiritisme) dans le théâtre du XIXe siècle. Fany Buy est comédienne depuis 2003. Intervenante dans diverses formations, elle travaille également dans le domaine de la voix en tant qu’interprète-doubleuse et comédienne audiodescriptrice. En 2019, Fany intègre la Compagnie L’Autre Rive en tant que comédienne et audiodescriptrice pour le spectacle Le Brasier. En 2020, elle a rejoint l'équipe de la Cie Home Théâtre (Lille). J'ai posé à Fany quelques questions à propos des "POCHES".
Quel est le principe des "POCHES" ?
Les POCHES DE RÉSISTANCE POÉTIQUE sont des pastilles visuelles et sonores à sucer ou à croquer, qui offrent un contrepoint à l'actualité brûlante par le frottement entre le texte ultracontemporain et l’image d’archive. Nous les concevons ensemble avec Pauline : un texte court, une voix, et un montage de photographies puisées dans le fonds iconographique de la BnF. Ce sont de petites envolées poétiques et concrètes, conçues pour piquer, guérir, frotter - autant de manières de toucher.
Quel est le rythme de publication des "POCHES" ?
Leur parution se fait au rythme de l’écriture de Pauline et de mes recherches dans le fonds iconographique que la BnF met généreusement à la disposition du projet. Les vidéos sont diffusées sur ma chaîne YouTube et le site de Pauline, puis relayées sur les réseaux sociaux avec l’appui de la BnF. Les POCHES DE RÉSISTANCE POÉTIQUE comptent actuellement une première saison complète, et une deuxième en cours insolemment intitulée « deuxième vague ».
Pensez-vous un jour exposer les "POCHES" dans un espace physique ?
Une forme spectaculaire a été imaginée à partir du format vidéo : Les POCHES D’URGENCE POÉTIQUE. Ce dispositif, conçu pour une seule personne à la fois, se situe à la frontière entre performance, écriture et cinéma. Le spectateur se présente à guérite et confie son état du moment : ses inquiétudes, ses doutes, ses douleurs. Pauline compose aussitôt un fragment poétique adapté aux besoins de la personne, que je mets en voix et enregistre. Toutes les deux, nous créons ensuite une poche d’urgence poétique spécifiquement destinée à guérir, soigner, consoler le spectateur.
Un dernier mot ?
LES POCHES ont déjà attiré l’intérêt de nombreuses personnes qui nous suivent et nous soutiennent. Qu'elles soient ici ointes de notre reconnaissance.
4) Après les tweets 🐦🦅
A la fin de l'année 2013, le Children's Museum of the Arts - CMA (New-York, USA) présentait l'exposition Tweet :
“Aujourd'hui couramment utilisé pour désigner une "courte communication de 140 caractères", avant 2006, "tweet" était utilisé pour décrire le gazouillis d'un oiseau, généralement perçu comme un son doux ou joyeux. À New York, on voit de plus en plus de piétons traverser la vie avec la tête enfouie dans un smartphone. Nous tweetons, nous envoyons des SMS, nous envoyons des e-mails en déplacement.”
Le musée indiquait ensuite :
“Le simple fait de regarder autour de nous pendant notre trajet quotidien se perd dans une société contemporaine de plus en plus fragmentée et agitée. L'exposition "Tweet" nous demande de faire une pause, de réfléchir et de nous souvenir d'un acte simple et accessible à tous. Regardez autour de vous, profitez de la nature et observez les oiseaux.”
Parmi les artistes de cette exposition collective figurait l'illustratrice et naturaliste Amy Jean Porter. Celle-ci y présentait une grande fresque composée de dessins d'oiseaux. Depuis elle a continué d'exposer et elle a aussi illustré plusieurs livres dont "Fungipedia: A Brief Compendium of Mushroom Lore" de Lawrence Millman.
Début novembre 2020, Amy Jean Porter a lancé une infolettre hebdomadaire, qu'elle présente ainsi :
“Wild Life [realwildlife.substack.com] est un lieu de collecte d'histoires et d'apprentissage sur les animaux alors que nos habitats entrent de plus en plus en collision. Je me concentre sur la vie sauvage commune... Recevez chaque vendredi dans votre boîte de réception un magnifique dessin d'animal avec une petite histoire vraie et quelques informations utiles.”
5) Flashs et retours ⚡🌐
Vous les avez peut-être ratées, Muzeodrome a compilé ces informations pour vous :
Ancienne étudiante du master 2 Musées et Nouveaux médias de la sorbonne Nouvelle (Paris), Marianne Fromencourt vient de lancer Musealia, un podcast d'interviews de professionnels de l'art et du musée. Dans le premier épisode, Marianne a interrogé Margot Coïc sur son métier de muséographe (au Vaisseau à Strasbourg). Marianne envisage pour l'instant un rythme d’un nouvel épisode toutes les deux semaines. A suivre...
Pendant le premier confinement, l'artiste plasticien et gastronome Marc Solal avait réalisé depuis sa cuisine de savoureux hommages à des artistes connus (voir Muzeodrome n°26 - notule 1). Il vient de regrouper cette série de travaux dans un ouvrage "In my Kitchen a Museum". En plus des 63 photos et des textes qui les accompagnent, Marc Solal a ajouté “un petit lexique pour que plus personne n'ait peur des noms parfois bizarres donnés aux différents courants artistiques”. (Ouvrage disponible à partir 17 décembre 2020)
A Genève, les Archives contestataires proposent depuis le 8 décembre 2020 une exposition en ligne présentant une collection d'affiches récemment numérisée. Une numérisation qui répond à une nécessité de conservation et qui permet de mettre en valeur un patrimoine graphique peu vu.
L'imagier, outil de coloriage interactif mis en place par Laurent Gontier pour le Musée de Cluny (voir Muzeodrome n°27 - notule 1) est maintenant praticable en langue anglaise. De plus à l'occasion des fêtes de fin d'année, un cadre graphique de circonstance vient entourer le coloriage téléchargé.
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A tout soudain,
Omer Pesquer { https://omer.mobi/ }
Ps : Merci à @dr_kouk pour sa relecture de ce numéro et des précédents.